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Natalie Dessay enregistre son premier récital de mélodies, et elle n'a pas choisi Debussy par hasard. Avec, dans la ligne de mire, les commémorations du 150e anniversaire de la naissance du compositeur, Natalie revisite un passé qui remonte au début des années quatre-vingt dix, lorsqu'en récital elle chantait, déjà, Apparition, Romance d'Ariel, Coquetterie posthume, Rondel chinois... Familière du rôle de Mélisande, interprète en 2010 de La Damoiselle Elue dans sa version avec orchestre, Natalie découvre aussi, très émue, les manuscrits de quatre mélodies inédites composées par un Debussy de vingt ans. Parmi eux, une ballade fantastique complètement atypique dans l'univers debussyste, Les Elfes, la plus longue mélodie jamais écrite par Achille-Claude. Une autre, la plus courte cette fois, inconnue de tous les musicographes : Le matelot qui tombe à l'eau. Natalie Dessay apporte un élan, une vivacité, une tendresse et une simplicité désarmante à ces poésies qu'elle se délecte de dire et de chanter. Les personnages du petit théâtre verlainien, les exotismes inspirés de Delibes et Bizet, les grandes envolées lyriques qui témoignent de tout ce que Massenet et Gounod, mais aussi Chopin, ont pu apporter à Debussy sont rendus ici sans chichis à leur juvénilité première. La mezzo-soprano Karine Deshayes, la harpiste Catherine Michel et le jeune choeur de Paris dirigé par Henri Chalet entourent délicatement Natalie Dessay et Philippe Cassard.

Dans son premier disque salué par la critique, Jean-Paul Gasparian avait démontré que sa technique lui permettait de se mesurer aux géants de la musique russe et que son jeu robuste était capable de sensibilité. Son deuxième opus, consacré cette fois à Chopin, vient confirmer ces qualités. Il faut dire que les quatre Ballades représentent un sacré morceau de bravoure où Jean-Paul Gasparian brille particulièrement. Et si le pianiste français fait preuve de rigueur, il s'abandonne aussi volontiers au lyrisme et à la beauté de ces pages, des Nocturnes aux Valses en passant par les Polonaises. La ligne, toujours élégamment mise en valeur, et la plénitude de l'expression font de cet album un jalon dans la discographie du jeune pianiste et plus généralement dans celle de Chopin.

Durant plus d'un siècle, des derniers Valois aux premières années du règne de Louis XIV, l'air de cour fut véritablement le genre emblématique de la musique française profane. Le terme témoigne de l'empreinte et de la transformation par les milieux mondains et lettrés de genres vocaux d'origine populaire comme le vaudeville, mâtinés d'influences italiennes (villanelle), basés sur les principes d'un strophisme musical simple qui facilitait une meilleure compréhension du texte poétique. Ce sont surtout trois compositeurs qui dominèrent la production d'airs de cour sous les règnes d'Henri IV et de Louis XIII, portant alors le genre à son apogée : Pierre Guédron (1565-1620), Antoine Boesset (1587-1643) et Etienne Moulinié (1599-1676). A l'occasion des 20 ans de son ensemble, Vincent Dumestre a choisi de célébrer l'Air de Cour en rassemblant des extraits issus de ses cinq enregistrements qui lui sont consacrés. Un livre accompagne ce double album avec un texte écrit par Thomas Leconte, du Centre de Musique Baroque de Versailles. Une riche iconographie et un éclairage historique par Alexandre Maral, conservateur général au Musée National du Château de Versailles, complètent l'ouvrage.

Le Trio SR9 qui a pour propos de mettre les percussions en valeur, s'est fait une spécialité des concerts à 3 marimbas. Après avoir tourné dans de nombreux pays d'Europe et en Amérique du Nord avec un programme dédié à Jean-Sébastien Bach, voici un nouveau programme intitulé "Alors, on danse ?" Le jeu du marimba vient révéler le caractère spirituel, artistique ou festif des musiques de danses, traversant ainsi les époques de Rameau à nos jours ! Entre transcriptions et créations originales pour trois marimbas danses de cour et musiques folkloriques se côtoient, dévoilant encore un peu plus les richesses multiples de ces somptueux instruments.

Alvorada ou l'invitation au voyage de la violoncelliste Ophélie Gaillard et de son violoncelle magique, à un périple musical de l'Espagne à l'Amérique du Sud (Brésil, Argentine, Cuba). Dans un mélange exceptionnel de pièces classiques et d'arrangements des plus grands thèmes de ces musiques sulfureuses, le violoncelle chante avec le bandonéon, danse avec le piano, la guitare et les percussions, s'abandonne dans une intimité amoureuse avec les voix. Alvorada nous plonge dans un univers sonore o l'énergie frénétique des rythmes de ces musiques hispaniques et sud-américaines nous met en transe, de laquelle surgit une nostalgie sensuelle et à laquelle répond un tango vertigineux. Tous les sens sont en éveil à l'écoute de ces chants et rythmes envoutants. La couleur du soleil, de l'aube à son coucher, se retrouve dans le savant mélange né de l'alternance de ces pièces universelles et enchanteresses. Tous les musiciens exceptionnels (Sabine Devieilhe, Toquinho, Sandra Rumolino, Juanjo Mosalini, Rudi Flores, Emmanuel Rossfelder, Gabriel Sivak...) participant au voyage Alvorada nous hypnotisent, nous fascinent et nous permettent de les accompagner, à chaque instant, dans ce cheminement de rêve proposé par Ophélie Gaillard.

Entre 1835 et 1839, lorsque Liszt a composé ce cycle, il atteint le sommet de sa créativité. En grand connaisseur, Alfred Brendel disait que cette musique porte en elle la force de mettre l'interprète sans complaisance face à lui-même et ses faiblesses, pas seulement sur le plan technique mais aussi sur l'incroyable authenticité dans l'expressivité qu'elle requiert. Le jeune Francesco Piemontesi a toutes les qualités pour affronter cette oeuvre au disque et en donne ici une version étonnante de confiance et d'autorité. Bruno Monsaingeon, le réalisateur de films musicaux, a choisi de filmer ce prodige du clavier qu'est Piemontesi dans un documentaire associé au disque tout en montrant les lieux en Suisse que Liszt évoque dans l'oeuvre.

Ardent défenseur de l'oeuvre d'Antonio Salieri, Christophe Rousset poursuit son exploration en exhumant le manuscrit d'Armida, parfaite synthèse des styles italien et français, créé à Vienne le 2 juin 1771. Salieri a tout juste vingt ans lorsqu'il aborde l'opera seria avec le célèbre sujet des amours de Renaud et d'Armide, tiré de la Gerusalemme liberata du Tasse. En trois actes, tissés dans une trame très dense, Armida concentre l'intensité dramatique autour de quatre personnages dont la rencontre figure la confrontation entre Occident et Orient. La plasticité de sa composition, son originalité et son brio assureront durablement la réputation de Salieri, qui se déploiera triomphalement par toute l'Europe.

Le Concerto pour clavecin en ré mineur de J.S. Bach est la figure centrale de ce programme : " cette musique me semble absolument moderne : un fil continu au développement infini, lui donnant un aspect quasi hypnotique... Ces adjectifs appartiennent aussi aux musiques actuelles, qu'elle soit 'populaire' comme en musique techno, ou bien plus 'savante' comme dans le mouvement dit répétitif ou minimaliste ", dit Simon-Pierre Bestion. 230 ans plus tard, Gorecki compose dans la même tonalité un concerto pour clavecin et l'utilise " comme un instrument très rythmique et extrêmement furtif ". Figure du mouvement minimaliste américain, John Adams compose Shaker Loops en 1978 : " ce chef-d'oeuvre prend un intérêt tout particulier puisque nous jouons sur des instruments à cordes en boyaux. Cela donne un grain inouï à cette musique. " La Passacaille de Bach (" 41 fois un seul et même thème musical ") et les Litanies de Jehan Alain complètent ce programme qui voit rassemblés les frères Bestion, Louis-Noël Bestion de Camboulas étant le soliste des concertos.